Matthias Bruggmann

17.10.2018 – 27.01.2019
Matthias Bruggmann est le lauréat de la deuxième édition du Prix Elysée, grâce au soutien de Parmigiani Fleurier, pour son projet sur la Syrie. Souhaitant « susciter, chez un public occidental, une compréhension viscérale de la violence intangible qui sous-tend tout conflit », il fait le pari de ne rien voiler de ses images, explicites et brutales. Réalisées sur le terrain, elles enjoignent le spectateur de ralentir, et de prendre la mesure d’un conflit – certes géographiquement lointain, mais rendu omniprésent dans les médias.

Si des dizaines de milliers de clichés de torture pris par des photographes syriens n’attirent pas l’attention du public occidental, que peut accomplir un étranger qui ne parle même pas arabe ? Les photographies de Matthias Bruggmann portent un regard critique sur la représentation des horreurs de la guerre. Elles donnent à voir au public occidental une image plus nuancée de l’expérience du conflit armé et gomment les frontières entre photojournalisme et photographie artistique contemporaine.

Commencé en 2012, son projet nous immerge dans la complexité du conflit. Ses images, qui couvrent une zone géographique plus vaste que la Syrie, questionnent nos suppositions morales et suscitent une meilleure compréhension de la violence.

Matthias Bruggmann explique : « D’un point de vue formel, mon précédent travail amenait le public dans une situation où il devait décider de la nature de l’œuvre même. Ce mécanisme pourrait ressembler, bien qu’on puisse le contester scientifiquement, à ce qui se produit en physique quantique lorsque l’observation change la nature de ce qui est observé. Mon travail sur la Syrie s’inspire de ce présupposé. D’un point de vue documentaire, il s’agit, à ma connaissance et jusqu’à présent, de la seule œuvre de ce type réalisée à l’intérieur même de la Syrie par un seul photographe occidental, et ce en grande partie grâce à l’aide et aux travaux dévoués de certains des meilleurs experts indépendants sur le conflit. En raison de la nature de ce conflit, j’estime qu’il est nécessaire d’étendre le périmètre géographique de ce travail. Il s’agit là essentiellement d’une tentative de créer un sentiment d’ambiguïté morale. Sa conception vise à mettre le public mal à l’aise en remettant en cause ses propres suppositions morales, et ainsi à essayer de susciter, chez un public occidental, une compréhension viscérale de la violence intangible qui sous-tend tout conflit. L’un des moyens utilisés consiste à pervertir les codes normalement employés dans la photographie documentaire pour accroître l’identification avec le sujet. »

Avertissement : le contenu de l’exposition est susceptible de heurter la sensibilité d’un public jeune ou non averti.

Crédits

Commissaire

Lydia Dorner, Conservatrice assistante, département des expositions, Musée de l'Elysée