Nicolas Faure

17.11.2005 – 05.02.2006

Paysages A. Jardins de la vitesse

Ce projet de photographie contemporaine est une forme de réflexion sur la constitution du paysage, sa transformation et sa reconstruction « plastique » dans le cadre de la construction des autoroutes suisses. Par souci écologique, l’Etat suisse aménage des espaces de nature aux abords directs des autoroutes. Ces jardins sont la plupart du temps inaccessibles, ou restent invisibles en raison de la vitesse des véhicules. Le paysage n’existe pas sans sa représentation. Nicolas Faure constitue par ce travail une archive artistique dans la tradition de la photographie documentaire, tout en misant sur l’esthétique et la sensibilité contemporaines.|

«Le paysage se pense en moi, je suis sa conscience.» Cézanne

Avec Paysages A (A comme l’intitulé des autoroutes nationales suisses), Nicolas Faure s’intéresse aux aménagements immédiats des bords des autoroutes. Ces aménagements font partie des mesures à grande échelle d’intégration des autoroutes dans un environnement qui a été transformé de manière radicale. D’où ce patient travail de cosmétique, artificiel et utopique, qui vise à créer et entretenir toutes sortes de zones de verdure, à cultiver des plantes et des buissons, à créer une frontière, voire un écran, entre le no man’s land qu’est l’autoroute et le territoire qu’elle traverse. C’est un paysage nouveau créé de toutes pièces, avec une référence à la nature, donc à une forme d’identité. Nicolas Faure a produit à partir de cet univers disparate un ensemble de représentations qui montrent la puissance paysagère des autoroutes suisses.

Nicolas Faure a découvert aux abords des autoroutes de véritables jardins artificiels, lieux d’utopie et d’illusion. C’est là un enjeu des photographies de Nicolas Faure : permettre non seulement de voir autrement, mais de regarder de nouveaux paysages, de montrer une forme de beauté aux antipodes de la nostalgie et pourtant au centre de nos préoccupations modernes, y compris écologiques. Elles permettent aussi de comprendre le lien presque symbolique que l’homme entretient avec la nature, ou du moins l’idée qui doit s’en dégager.

Par ces paysages photographiques, tout ce qui est simplement vu, suggéré ou deviné devient évident et peut être enfin regardé. Du point de vue esthétique ces représentations forment un ensemble d’une très grande cohérence. Du point de vue du sens, les paysages de Nicolas Faure relèvent de la volonté d’inscrire dans le présent - ce que la photographie sait le mieux faire certainement - une esquisse de l’héritage légué par le XXe siècle aux générations futures. Et dans lesquels résident, secrètement, des signes qui seront ceux de la nostalgie de demain.

Entre l’art et le document, à la frontière fragile mais encore exacte qui les sépare, les paysages photographiques de Nicolas Faure rappellent les exigences de beauté et de vérité des idéaux de la Renaissance, dans une perspective résolument contemporaine.